12
2018

Brexit: l'e-commerce en première ligne


Quel que soit le scénario, il est important, pour les sociétés d’e-commerce, de se préparer, assure Nicolas Khedir chez EY.

“En l’absence d’accord le 29 mars 2019, les envois vers le Royaume-Uni deviendront des exportations au départ de l’Union européenne puis des importations, avec les formalités – qui prendront du temps – et les droits de douane que cela suppose”, prévient Nicolas Khedir, Senior Manager Global Trade d’EY. “Cela affectera la compétitivité de nos sociétés d’e- commerce. La dévaluation annoncée de près de 25% de la livre sterling accentuera ce phénomène. Il conviendra de proposer dès que possible des prix en euros et en livres, au choix du client, et d’adapter vos engagements sur les délais de livraison et d’approvisionnement.”

Il faudra par ailleurs suivre de près les évolutions de la réglementation britannique et prévoir deux cadres distincts: l’un pour l’UE, l’autre pour le Royaume-Uni. Pour rappel, en vertu de la législation douanière européenne, les importations d’une valeur n’excédant pas 150 euros bénéficient d’une franchise de droits de douane, à laquelle s’ajoute une franchise de TVA pour les produits d’une valeur inférieure ou égale à 22 euros. Le risque existe au Royaume-Uni que ce seuil de 22 euros pour l’exemption de TVA tombe après le Brexit, le Royaume-Uni ayant toujours été partisan de son abolition.

Suivre les négociations

Si l’accord négocié par Theresa May est validé par le Parlement britannique, une période transitoire s’ouvrira jusqu’en décembre 2020 (ou 2021). “Alors, ce sera business as usual pour nos sociétés d’e-commerce, mais elles devront prêter attention aux négociations sur un accord futur”, prévient Nicolas Khedir, qui estime que ce scénario “est le plus probable”. Cette période transitoire pourrait déboucher sur l’activation du fameux filet de sécurité (“ backstop ”), à savoir une union douanière temporaire, le temps de sceller la nouvelle relation bilatérale. Cette union douanière impliquerait des formalités douanières mais sans droits de douane.

“Si, d’ici à 2020, UE et Royaume-Uni parviennent à un accord comme celui qui lie l’UE au Canada – le CETA – il faudra se préparer aussi. Car pour bénéficier de l’exemption de droits de douane sur les transactions, il faudra prouver l’origine européenne ou britannique du produit. Donc réaliser des études sur l’origine afin de démontrer entre autres qu’il satisfait aux futures règles renfermées dans l’accord .”

“Les Britanniques ne seront plus protégés contre le géoblocage. Vous pourrez par conséquent leur appliquer des tarifs et des conditions différenciés.”
Nicolas Khedir, senior manager EY Tax Consultants
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“Derniers conseils du spécialiste: « En cas de ‘no deal’, adaptez-vous au plus vite. Déplacez un maximum de produits destinés au marché britannique sur le sol du Royaume-Uni avant le 29 mars 2019. Attention, les prix des espaces de stockage sont déjà en train d’exploser! Et découplez les commandes venant de pays tiers pour ne pas payer deux fois la taxe d’importation.”

La fin du géoblocage

“Theresa May a affirmé que le Royaume-Uni quitterait le Marché unique numérique”, rappelle Nicolas Khedir. “Les Britanniques ne seront plus protégés contre le géoblocage, dont la réglementation européenne vise à traiter tous les consommateurs de l’UE sur pied d’égalité. Vous pourrez par conséquent leur appliquer des tarifs et des conditions différenciés.”

En cas de “no deal”: quelques chiffres

 50 à 150 euros: coût des formalités douanières (hors droits de douane) à réaliser pour l’exportation depuis la Belgique, puis pour l’importation au Royaume-Uni. (Source: EY)

 300 euros: surcoût logistique anticipé par transport dû aux multiples arrêts et retards anticipés. (Source: EY)

 2 à 9 jours: estimation par Honda du temps supplémentaire que ses pièces mettront à arriver au Royaume-Uni. (Source: Financial Times)

Nicolas Khedir
senior manager EY Tax Consultants
+32 (0)2 774 61 62